L’odeur de chocolat fondu emplissait la cuisine et comme toujours, cette odeur faisait saliver le pâtissier qui s’activait aux fourneaux. Néanmoins, le pâtissier en question prit sur lui et ajouta le chocolat fondu à la préparation de sa tarte. Il coupa ensuite quelques zestes d’orange qu’il rajouta, avec le jus de l’orange en question. De bonne humeur Beny, puisque c’était de lui qu’il s’agissait, se mit à fredonner en continuant sa préparation. Une fois sa tarte terminée, il attendit que sa fournée de cupcake soit cuite, puis il la passa au four. En attendant qu’elle cuise, il s’attela aux glaçages de ses cupcakes. Le glaçage, c’était vraiment la partie préférée de Benoît lorsqu’il s’agissait de pâtisserie ! Il prenait toujours soin de bien réussir cette partie délicate, c’était d’ailleurs celle pour laquelle il s’appliquait le plus. Enfin, il s’appliquait partout, mais surtout au moment de la décoration. Il était occupé à faire de belles fleurs en glaçage lorsque la sonnerie magique de son four l’avertit que les cookies étaient prêts. Il eut à peine le temps de les sortir du four que, déjà, la minuterie d’un autre four l’avertit que la tarte était cuite.

Le brun, une fois le glaçage de ses cupcakes terminés, attrapa toutes ses nouvelles préparations et quitta la cuisine pour tout installer en salle. Après tout, à quoi servait il de préparer plein de bonnes choses si tout rester caché dans l’arrière-boutique ? Mieux valait tout exposé pour que les clients aient l’embarras du choix ! Sans compter que, et il le savait parce qu’il en avait eu des échos, toutes ces gourmandises faisaient parfois craquer les clients plus que de raison. En arrivant dans la boutique à proprement parlé, Benoît se rendit compte du monde qui était présent et décida de rester au comptoir pour prêter main forte à son serveur. Heureusement qu’il avait terminé de préparer les gâteaux pour l’après-midi, sinon ils auraient été débordé !

Il venait tout juste de terminer de servir un groupe de clients lorsqu’une belle brune entra dans la boutique. L’arrivée de la demoiselle fit tourner la tête d’un bon nombre d’hommes, qui la trouvaient sans doute très à leur goût, mais pour sa part, Beny se contenta de lui souhaiter la bienvenue en souriant. Avant de se figer lorsqu’elle ôta ses lunettes de soleil. Cette femme…C’était…la fiancée d’Ezéchiel ! Valandra Widow, s’il ne se trompait pas. Et ils les avaient vu tellement souvent dans sorcière hebdo qu’il ne pouvait pas se tromper. Que faisait-elle ici ? Se demanda-t-il le souffle court avant de secouer la tête. A quoi pensait-il au juste ? Elle était juste ici en tant que cliente, elle ne pouvait pas savoir qu’il était le petit ami de son fiancé…non ? Inquiet, et ne voulant pas faire une bêtise, il s’efforça de la traiter comme n’importe quelle cliente.

-Bonjour mademoiselle, qu’est-ce que je peux vous servir ? demanda-t-il la voix un peu plus nouée que d’habitude.

Bien qu’il aurait mieux fait de s’abstenir, il détailla la jeune femme qui lui faisait face de l’autre côté du comptoir. Elle était vraiment très belle, bien plus que sur les magazines, et en plus, il la trouvait très classe, et imposante. Sans compter qu’elle formait un très beau couple avec l’homme qu’il aimait alors que lui…il ne pouvait s’empêcher de penser qu’il devait être ridicule aux côtés de l’héritier Crowford. Sentant son moral descendre d’un cran et sa bonne humeur disparaître peu à peu, l’ancien poufsouffle décida de penser à autre chose. Il se concentra donc sur la commande de la brune. Il venait juste d’attraper une pince pour servir son cupcake à la jeune femme que son cœur se serra quand elle fit mention de son fiancé. Elle voulait apporter une tarte chocolat-orange à Ezéchiel…et faire inscrire son nom sur ladite tarte. Le voyait-elle ce soir ? Il n’était pas au courant… Lui qui avait justement envie de voir son petit allait devoir s’abstenir.

-Oui…oui c’est possible… Je vous fais ça de tout de suite… répondit-il d’une voix faible en évitant de croiser son regard.

Il sortit précautionneusement la tarte qu’il avait préparé quelques minutes plus tôt et alla chercher une douille de chantilly pour y inscrire le prénom de l’homme qu’il aimait plus que tout au monde. Sur un gâteau qui allait lui être offert par quelqu’un d’autre… Il avait curieusement envie de refuser de vendre cette tarte, mais il n’en ferait rien, c’était une cliente comme une autre, et ce n’était pas parce qu’elle était fiancée avec Ezéchiel qu’il devait être méchant avec elle. En plus, si elle voulait vraiment lui faire plaisir, elle aurait dû lui offrir un baba au rhum ou une forêt noire, car le riche héritier préféré les gâteaux alcoolisés. En réalité, Benoît souhaité secrètement que son amoureux dédaigne le gâteau que la brune allait lui apporter, mais il se doutait qu’il y avait peu de chance pour ça.

Occupé à écrire le nom de son cher et tendre sur une tarte qu’une péronnelle comptait lui offrir, Beny s’efforçait d’ignorer de son mieux le pincement au cœur qu’il éprouvait. C’était juste une pâtisserie, offerte à Ezé par sa fiancée…ça ne voulait rien dire de particulier…N’est-ce pas ? De toute façon, ce n’était pas comme si elle l’avait faite elle-même la tarte ! Avec son emballage, l’héritier Crowford reconnaîtrait tout de suite que la pâtisserie venait de sa boutique ! Oui mais…et si elle sortait la tarte de sa boîte avant de l’offrir à son brun ?! Son imagination carburant à fond, le pâtissier pouvait presque voir la brune arrivait dans le manoir Crowford et s’avancer vers son fiancé avec la tarte disposée dans une belle assiette de porcelaine… La garce ! pensa distinctement Beny avant de se reprendre. Pourquoi la qualifiait-il ainsi ? Ça ne lui ressemblait pourtant pas… D’un autre côté, il n’avait jamais eu à faire avec la fiancée de son petit ami donc… Il allait ranger la tarte de la discorde dans une boîte en carton quand la brune lui fit une requête supplémentaire.

Avec amour ? Elle se foutait de lui là ou quoi ?! Hors de question qu’il fasse un petit cœur pour qu’Ezé pense que cette femme…cette succube ! lui offre une tarte avec amour ! Ne cherchant pas à comprendre l’origine de cette colère pourtant inhabituelle, Beny se contenta de mettre à exécution son intention première : ranger la tarte dans une boîte et la poser sur le comptoir. Elle pouvait bien aller se faire voir pour qu’il ajoute un petit cœur sur la tarte, il ne fallait pas se moquer du monde non plus ! Il voulait bien être gentil, mais il y avait des limites à l’auto-flagellation.

-Si vous voulez lui offrir quelque chose avec amour, faites le vous-même ! déclara-t-il un peu plus froidement qu’il ne l’aurait voulu.

C’est vrai ça, il fallait être culotté pour vouloir faire quelque chose avec amour quand on ne le faisait pas soit même ! Et qu’elle n’aille pas lui faire croire qu’elle avait été achetée la tarte avec amour, il n’y croirait pas. Il n’y avait rien de bien compliqué dans le fait de bouger ses fesses rehaussées par des talons d’une hauteur vertigineuse pour acheter un gâteau dans une pâtisserie. D’ailleurs, si elle avait vraiment voulu faire plaisir à Ezéchiel, elle s’y serait pris autrement, pas en lui offrant une banale tarte orange-chocolat ! Sans même se rendre compte de ce qu’il était en train de faire, et sans avoir conscience de la personne à qui il s’adressait, Benoît fit part du fond de sa pensée à la demoiselle.

-D’ailleurs, entre nous, si vous vouliez vraiment faire plaisir à Ezéchiel, il aurait fallu lui prendre un baba-au-rhum ou à la limite une forêt noire, il a un faible pour les pâtisseries alcoolisées… En attendant, ça vous fera quatre mornilles s’il vous plaît. Voulez-vous une serviette pour le cupcake ?

Il agissait sournoisement ? Peut-être bien, mais il s’en moquait. En réalité, il était même plus que ravi de remettre l’héritière Widow un tant soit peu à sa place. Certes il ne l’avait jamais rencontrée et il ne savait pas grand-chose d’elle, mais il ne l’appréciait pas beaucoup. Peut-être était-ce tout bêtement dû au fait qu’elle était fiancée à l’homme qu’il aimait de tout son être. Il avait beau savoir que ce mariage n’aurait pas lieu, savoir que tout le monde pensait que la brune était la promise du fils Crowford l’agaçait, et le blessait aussi, mais il préférait enfermer ces sentiments au fond de lui plutôt que de souffrir bêtement.

Il avait naïvement cru que la demoiselle s’en irait une fois sa commande prête, mais non, il se trompait lourdement. Il fallait qu’elle en rajoute une couche en parlant de gâteau de mariage. Comme si elle allait en avoir besoin dans les mois qui venaient tiens ! A croire qu’elle le faisait exprès pour l’embêter… mais si elle voulait jouer à ce petit jeu, ils pouvaient être deux à y jouer. Prenant son air le plus mignon et le plus innocent, il répondit à sa question.

-Oui, je fais des gâteaux de mariage en effet, mais il faut les commander plusieurs semaines à l’avance. Pourquoi, l’une de vos connaissances va se marier prochainement ? demanda-t-il avec un sourire mignon, bien que ses yeux étaient étrangement froid.

Si elle ne comprenait pas qu’il savait pertinemment qu’elle n’allait pas épouser Ezéchiel, alors il le lui ferait comprendre plus clairement. Hors de question qu’il la laisse lui voler SON Ezéchiel !

S’il était vrai qu’il arrivait à Ezéchiel de boire de l’alcool de temps à autre, de manière plutôt régulière d’ailleurs, Beny n’aurait pas été jusqu’à dire qu’il consommait trop d’alcool. Déjà parce que son brun connaissait parfaitement ses limites et qu’il ne les dépassait jamais et ensuite, parce qu’il n’avait rien d’un alcoolique. Au contraire, il était toujours maître de lui ! Sans parler du fait qu’il avait une classe indiscutable avec un verre rempli d’un liquide ambré dans la main. Alors certes, il arrivait que les baisers de son amoureux aient un petit goût alcoolisé, mais le pâtissier s’y était habitué à présent. A dire vrai, il en venait même à apprécier cette spécificité qu’avaient parfois les lèvres du Crowford. Néanmoins, malgré son désaccord, le brun ne chercha pas à répondre à la jeune femme qui lui faisait ça. Déjà qu’il avait été désagréable avec elle – et qu’il s’en voulait un peu pour ça – il n’avait pas envie, en plus, de s’aventurer dans une discussion qui pourrait devenir houleuse.

Il prit donc les quelques pièces en argent que lui tendait la demoiselle et lui rendit sa monnaie avec un sourire un peu timide. Décidément, il ne savait vraiment pas quoi penser d’elle. Elle n’avait pas l’air méchante pourtant, elle se souciait même du bien-être de son fiancé ! Benoît aurait dû lui en être reconnaissant pour ça…mais une part de lui-même, qu’il découvrait et qu’il n’appréciait pas vraiment, s’obstinait à la détester. Il aurait dû être content pourtant, qu’une autre personne, proche d’Ezéchiel, se soucie du bien-être de ce dernier, mais rien à faire, il ne pouvait s’empêcher d’être jaloux. Le simple fait de l’imaginer aux côtés d’Ezéchiel lui donnait une curieuse envie de pleurer couplée à une envie de fracasser du verre contre un mur. Sans parler du fait qu’il était parfois hanté par des images – qu’il aurait bien envoyé brûler au fin fond des Enfers – de son brun s’adonnant aux plaisirs de la chair avec sa fiancée. Il lui était même arrivé de pleurer en se réveillant après un cauchemar de la sorte…

Peu désireux de s’attarder sur ce genre de pensées néfastes pour sa santé mentale, le pâtissier préféra se concentrer de nouveau sur la jeune femme de bonne famille et son histoire de gâteau de mariage. Aussitôt, il s’en voulu d’avoir été mesquin avec elle en voyant son visage défait, elle avait vraiment l’air mal à l’aise et il ne pouvait s’empêcher de croire que c’était de sa faute. En entendant l’histoire de sa cousine et en la superposant à ce qu’il savait déjà – à savoir que son mariage avec Ezéchiel n’aurait jamais lieu – Beny ne put que compatir avec la demoiselle. Comme ce devait être horrible pour elle ! D’un seul coup, il réalisa que, peut-être, s’il n’avait pas été là, elle se serait mariée avec l’héritier Crowford, et elle n’aurait pas à jouer toute cette comédie. Au final, c’était lui l’intrus de l’histoire, l’imposteur, le fauteur de trouble… Lui qui venait briser les rêves d’une pauvre jeune femme qui n’avait rien demandé…

-Je…je peux m’occuper du gâteau de votre cousine si vous le souhaitez, lui proposa-t-il d’une voix blanche dans laquelle on entendait un soupçon de culpabilité.

Il essaya de se ressaisir et fit le tour du comptoir pour se retrouver plus près de la demoiselle brune qui lui faisait tant de peine. Il la regarda un instant sans rien dire, le regard triste, puis se dirigea vers l’une des tables de sa boutique. Cette dernière étant presque vide de clients, il pouvait se permettre de discuter un peu avec elle.

-Venez, installez-vous là, ainsi vous pourrez me dire ce que vous souhaitez pour votre cousine, l’informa-t-il d’une voix qui était plus ou moins redevenue normale.

Il disparut ensuite un instant en cuisine pour prendre du papier et un crayon, histoire de pouvoir noter les attentes de la demoiselle. Il profita aussi de ce léger détour pour disposer sur une assiette un fondant au chocolat ornée d’une rose en pâte d’amande sur une assiette. Il ajouta un peu de crème anglaise sur la pâtisserie, attrapa une cuillère puis regagna la salle où il posa délicatement l’assiette devant la demoiselle avec un léger sourire.

-Tenez, c’est pour vous, cadeau de la maison, déclara-t-il en s’installant en face d’elle. Je vous écoute, ajouta-t-il, vous voulez une pièce montée ou un gâteau plus original ? Vous avez peut-être une idée précise de ce que vous attendez ?

Finalement, lorsqu’il n’était pas question d’Ezéchiel dans la conversation, il redevenait lui-même. C’était tout de même étrange qu’il réagisse quand l’héritière Widow se mettait à parler de l’homme qu’il aimait…

Incapable de rester de marbre face à la demoiselle dont les yeux étaient plein de larmes, Beny l’invita à s’asseoir pour discuter, avec elle, du gâteau qu’il pourrait réaliser pour le mariage de sa cousine. La pauvre, se devait être horrible pour elle de devoir organiser le mariage de sa cousine, enfin d’aider à l’organisation, alors qu’elle savait pertinemment que son propre mariage n’aurait jamais lieu. Le pâtissier était d’ailleurs dans une position inconfortable. D’une part, il compatissait avec Valandra, qui devait jouer la comédie alors qu’elle savait qu’elle ne se marierait jamais avec Ezéchiel, peut-être en avait-elle envie d’ailleurs, ça ne l’étonnerait pas, après tout, Ezéchiel était formidable… Mais d’un autre côté, il se réjouissait d’une certaine manière du malheur de la brune. Après tout, c’était bien parce qu’elle ne deviendrait jamais madame Crowford qu’il pouvait être heureux avec l’homme qu’il aimait… Comme on disait, le malheur des uns fait le bonheur des autres, mais Benoît se sentait quand même coupable de se réjouir de l’annulation prévue de ce mariage.

Après qu’elle soit installée, il disparut en cuisine pour aller lui chercher un fondant au chocolat. Il ne savait pas comment lui remonter le moral, il n’avait pas de solution à ses problèmes, mais peut-être que cette douceur lui ferait du bien. Après tout, le chocolat aidait les gens à être de meilleure humeur, c’était bien connu ! Il la rejoignit donc la demoiselle et s’installa en face d’elle après avoir posé l’assiette gourmande devant elle. Lorsqu’elle déclara qu’il devait la trouver pathétique, le pâtissier s’empressa de nier de la tête.

-Non pas du tout ! Je comprends ce qui vous arrive…au contraire, je vous trouve très courageuse, confia-t-il en rougissant légèrement.

Oui, il la trouvait vraiment courageuse d’endurer tout ça, lui-même n’en aurait pas eu la force, il devait le reconnaître. D’un autre côté, Beny avait toujours eu du mal à évaluer ses propres qualités, il n’était pas très clairvoyant lorsque ça le concernait. Elle lui confia ensuite qu’elle adorait ses fondants au chocolat, ce qui fit naître un sourire heureux sur le visage du brun.

-Je suis ravie que vous aimiez mes pâtisseries, entre nous, moi aussi je les adore ! Oh et…vos hanches sont parfaites, vous n’avez pas à vous inquiéter pour ça… ajouta-t-il en détournant les yeux, gêné.

La conversation revint ensuite sur le sujet qui les avait fait s’asseoir, ce qui permit à Benoît de se reprendre et de pouvoir, de nouveau, la regarder. Curieusement, quand il parlait de pâtisserie ou de gâteaux qu’il était capable de faire, il était beaucoup plus assuré que sur les autres sujets. Peut-être était-ce dû au fait que c’était l’un des seuls domaines dans lequel il était sûr de lui.

-Vous savez, même avec une pièce montée on peut faire dans l’originalité, assura-t-il, il suffit de trouver la décoration appropriée, ou de jouer sur la forme. Sinon, en gâteaux moins traditionnels, j’ai déjà conçu un gâteau en forme de calèche pour un mariage, avec des figures de mariés assis à l’intérieur. J’ai aussi fait un autre gâteau qui était la reproduction de la robe de la mariée. Donc si vous avez une demande particulière, je peux y réfléchir, essayer et voir si elle est réalisable, proposa-t-il avec un sourire gentil.

Après tout, dans le monde du commerce, c’était le client qui était roi, il devait donc se plier à l’avis de la demoiselle, surtout que le gâteau était pour elle.

Une pièce montée avec une décoration moderne. En sachant que les couleurs du mariage seront le doré et l’argenté. Oui, c’était dans ses cordes songea Beny en réfléchissant d’ores et déjà aux propositions qu’il pourrait faire à la demoiselle. Il ne connaissait pas les mariés, il ne pouvait donc pas savoir ce qui leur conviendrait le mieux, et ce qui collerait le plus à leurs envies. D’habitude, il posait des questions aux futurs mariés qui voulaient une pièce montée mais étant donné que le gâteau était commandé par la cousine de la mariée, il ne le fit pas. A la place, il laissa libre cours à son imagination et décida de proposer trois créations à Valandra.

-Je vais vous faire plusieurs propositions et vous me direz ce qui vous convient le plus d’accord ? Et si aucune des propositions ne vous convient, n’hésitez pas à me le dire pour que j’en cherche de nouvelles. Le but étant quand même de combler les mariés, termina-t-il avec un petit sourire.

Il attendit que la demoiselle termine son fondant au chocolat pour se lancer dans ses descriptions. Il n’avait pas envie qu’elle laisse son fondant, encore tiède, refroidir pour l’écouter, ou qu’elle fasse une tâche sur sa tenue parce qu’elle ne faisait pas attention. Il avait déjà eu des cas comme ça et il s’était senti suffisamment coupable pour recommencer.

-Pour commencer, je vais vous proposer une pièce montée avec une touche de modernité sobre, pour ne pas brusquer les conservateurs. Plusieurs étages donc, avec une cascade de rose partant du haut pour finir jusqu’au bas du gâteau, commença-t-il en griffonnant un schéma de la pâtisserie en question sur un papier qu’il avait apporté.

Une fois son schéma terminé, il le montra à la demoiselle pour qu’elle se fasse une idée plus précise de ce qu’il était en train de lui décrire.

-Si vous trouvez ça trop sobre, on peut partir sur une pièce plus moderne mais élégante, continua-t-il en reprenant le papier où il continua à griffonner. Un gâteau à deux étages, le premier étant nettement plus grand que le premier, avec un nœud entourant ce dernier et un bouquet de rose. Finement décoré d’arabesque et de fleur. On peut même rajouter un ornement sur le haut si vous le désirez. Sinon, il y a la version extravagante mais qui peut faire beaucoup d’adepte. Une pièce montée en forme de château, avec des escaliers de part et d’autre qui arrivent sur le dernier étage, le tout orné de fleur et, pourquoi pas, de petits angelots.

Il resta silencieux, les dessins des trois pièces montées posées devant la brune, pour lui laisser le temps de réfléchir et de sélectionner le gâteau qui conviendrait le mieux pour sa cousine. Comme toujours lorsqu’il parlait de pâtisseries, Benoît était assuré, sûr de lui, on voyait qu’il maitrisait son sujet et qu’il savait de quoi il parlait. C’était un contraste étonnant pour ceux qui le connaissaient, mais au final, ce n’était pas si surprenant quand on connaissait la passion du jeune homme pour son métier.

La jeune femme en face de lui prit soudainement une grande inspiration, ce qui fit lever les yeux du pâtissier vers elle. Quand il l’entendit parler de crever l’abcès, il se sentit gêné d’un coup et n’osa pas la regarder. Oui, il savait ce qu’il en était, mais ce n’était pas pour autant qu’il ne se sentait pas désolé pour elle… Quand elle lui avoua à demi-mot qu’elle avait fini par espérer qu’Ezéchiel changerait d’avis sur la nature de leur mariage, il se sentit soudainement incroyablement triste pour elle, à tel point que c’était d’ailleurs lisible dans ses yeux alors qu’il la regardait.

-Je…je suis désolé pour vous… souffla-t-il piteusement.

Pour peu, il avait presque envie de la prendre dans ses bras pour la consoler, mais il se reprit avant de le faire. Il ne la connaissait pas et il ne savait pas comment elle aurait réagi. Surtout que tout le monde n’était pas aussi tactile que lui.

-Je suis navré si je vous ai mis mal à l’aise…c’était pas voulu et… Pour votre aveu je…je ferais mon possible pour rien dire à Ezéchiel…

Le problème, c’était qu’il était incapable de cacher quoique ce soit à son petit-ami, il devinait toujours tout ! Mais il ferait de son mieux pour ne pas lui révéler les sentiments de la jeune femme, il pouvait bien faire ça pour elle. Après tout, c’était lui qui lui volait son fiancé…