Le ton sérieux sur lequel Ian lui répondait aurait pu tromper la demoiselle. Du moins, s’il n’avait pas eu ce petit sourire qui trahissait qu’il était en train de la taquiner. Même si elle n’avait pas vraiment l’habitude d’être taquine – et encore moins avec un homme – Hélynah choisit pourtant de rentrer dans son jeu, constatant avec délice qu’elle appréciait ce genre de conversation mais surtout, qu’elle s’amusait et passait une merveilleuse soirée – qu’elle n’oublierait pas, elle en était sûre.

-Me voilà rassurée alors, que deviendrait le monde sorcier si le grand médicomage Holloway se mettait à ne plus soigner les blessés ! répondit-elle en s’efforçant de garder son sérieux alors que ses yeux pétillaient de malices.

Bon, elle avait beau le taquiner, sa remarque n’était pour autant pas tout à fait fausse. Elle pouvait très clairement s’imaginer la tête du responsable des urgences de Sainte-Mangouste si Ian lui annonçait du jour au lendemain qu’il arrêtait d’être médicomage. Il était même très probable que le responsable se retrouve lui-même aux urgences à cause du choc, il serait capable de faire une syncope. D’un autre côté, elle pouvait comprendre, les urgences manquaient quelque peu de personnel et Ian faisait parti des médicomages les plus doués de cette section de l’hôpital.

La jeune infirmière fut soulagée quand Ian ne s’attarda pas sur le sujet de l’alcool, elle n’avait pas vraiment envie d’admettre devant lui qu’elle n’avait qu’une faible résistance à l’alcool. Et encore moins de perdre le contrôle d’elle-même si elle venait à trop boire. Pour être honnête, Hélynah n’avait jamais été ivre, elle ne savait donc pas quels impacts avait l’alcool sur elle et elle n’avait pas du tout envie de le découvrir en présence de Ian. Elle tenait ce dernier en bien trop haute estime pour ça, sans compter qu’il lui plaisait vraiment beaucoup – énormément même. Finalement, elle préféra dévier le sujet elle-même en lui demandant comment il occupait son temps libre. Car aussi impensable que cela puisse paraître, oui, le personnel des urgences avait du temps libre.

La brune n’était pas étonnée par la réponse de Ian, elle comprenait que son travail lui prenne du temps, mais elle s’était attendue à ce qu’il fasse beaucoup de sport. En même temps, vu le corps qu’on pouvait deviner à travers ses vêtements, il avait effectivement l’air sportif, mais surtout musclé. Sans compter qu’elle avait déjà suffisamment entendu les femmes de Sainte-Mangouste fantasmer – pour ne pas dire baver littéralement – sur le corps de Ian. Corps qu’elles imaginaient pour la plupart du temps. Par contre, elle fut surprise d’entendre qu’il faisait parfois cinq heures de sport d’affilées. Ah oui quand même, ce n’était pas rien, mais bon, ça expliquer le fait que les regards féminins se tournent sur son passage.

-Et tu arrives à faire du sport à une horaire fixe avec le travail ? demanda-t-elle légèrement amusée, se doutant de la réponse. Je me doutais que tu faisais du sport, mais pas autant, ajouta-t-elle légèrement impressionnée. Tu pratiques un sport en particulier ou tu touches un peu à tout ?

Elle n’avait rien de spécialement contre le sport, mais elle n’était pas sûre de pouvoir survivre à une séance de sport de cinq heures en tout cas. Le reste de ses activités ne l’étonna pas non plus, elle avait pu voir dans son bureau des livres concernant la médicomagie et elle s’était doutée qu’il les avait lus. Quant aux voyages, et bien, ils en avaient parler plus tôt dans la journée. Par contre, quand il ajouta qu’il invitait des jolies jeunes filles à danser, avec ce sourire qui la fit fondre instantanément, elle ne put s’empêcher de sourire à son tour, à la fois amusée et conquise.

-Moi ? Oh je chevauche des dragons avec des grands vikings blonds, répondit-elle le plus naturellement du monde.

Elle parvint à garder son sérieux pendant quelques secondes encore avant de laisser un petit rire amusé s’échapper. Bon, ce n’était qu’arrivé une fois et c’était un dragon en bois, mais elle était sûre que Ian comprendrait de quoi elle parlait. Par contre, la comparaison entre Ian et un viking n’était pas loin de la vérité, songea-t-elle en le détaillant rapidement. Il était juste un peu moins chevelu qu’eux.

-Et bien, en dehors du travail, je lis les documents et les divers livres que me donne l’hôpital pour ma formation, sinon je lis beaucoup aussi, un peu de tout, je suis pas vraiment difficile en livre. Je vois des amis aussi, et je passe beaucoup de temps avec mes parents, je crois que ma mère a du mal à se faire à l’idée que j’ai quitté la maison, confia-t-elle sur un ton amusé. Je cuisine pas mal, déjà parce qu’il faut bien se nourrir, mais aussi parce que j’aime bien, je suis assez douée pour faire de gâteaux. Et…je dessine aussi, avoua-t-elle après une petite hésitation, mais je ne sais pas si c’est très concluant.

En réalité, Hélynah avait du mal à être critique sur ses propres dessins, elle savait qu’ils n’étaient pas complètement ratés, mais de là à dire qu’ils étaient réussis… Sa mère lui avait dit qu’elle dessinait bien et qu’elle avait un bon coup de crayon, mais c’était sa mère, elle n’était pas objective.

-Je me laisse invité à danser par des beaux médicomages blonds, ajouta-t-elle ensuite avec un petit sourire taquin.

En effet, Hélynah avait bien vite que si c’était des horraires fixes qu’elle voulait, elle ferait mieux de quitter Sainte-Mangouste, et encore plus le service des urgences. Heureusement, elle ne menait pas d’activité qui nécessitaient d’être disponible à un horaire fixe au moins une fois dans la semaine, ça aurait été contraignant sinon. En voyant l’air malicieux de Ian lorsqu’il parla d’une activité plus efficace que le sport pour se détendre mais qui pouvait être sportif également, la brune se douta de ce qu’était cette fameuse activité, mais elle préféra jouer les innocentes pour l’embêter un peu.

-Je ne savais pas que ton travail te détendait plus efficacement que le sport, répondit-elle sur un ton malicieux en tâchant de garder une tête impassible alors qu’un sourire amusé se formait sur ses lèvres. C’est pour ça que tu travailles autant ?

En entendant la liste de sport que faisait Ian, l’infirmière écarquilla légèrement les yeux de surprise, il ne mentait pas quand il disait qu’il touchait à tout.

-C’est vrai qu’avec un boulot comme le tiens, ça devait pas être facile d’assister aux entraînement et aux matchs. Si ça te manque, pourquoi tu n’organises pas quelques matchs avec le personnel de l’hôpital ? Je suis sûre que ça aurait du succès.

Ou plutôt, elle était prête à parier que la vision de médicomages et d’infirmiers sur des balais attirerait le personnel féminin de l’hôpital. A lui seul, Ian faisait déjà office d’argument de poids dans la balance.

-Et avec tout ça, tu t’es déjà retrouvé patient de ton service ? l’interrogea-t-elle avec un sourire en coin, légèrement amusé.

La comparaison qu’elle fit entre Ian et un viking amusa se dernier, amusant également Hélynah qui lui lança pourtant un regard sceptique, qu’on pouvait nettement traduire par « tu te poses vraiment la question ? » quand il affirma qu’il ne comprenait pas d’où venait ce surnom. Sa tentative d’imitation d’accent allemand arracha un petit rire amusé à la brune qui tenta pourtant de garder son sérieux, sans succès.

-Au hasard, je dirais que ça, commença-t-elle en posant doucement sa main sur sa chemise au niveau de ses abdominaux, te fais plus ressembler à un viking qu’à un allemand, mais tu devrais être flatté de nourrir les fantasmes des femmes. Je suis sûre que beaucoup d’hommes te jalousent, rien que dans cette salle il doit y en avoir.

Il suffisait de voir les regards qu’il suscitait pour comprendre que Ian faisait tourner la tête des femmes – elle-même succombait après tout – et qu’il rendait les hommes jaloux. Mais à l’heure actuelle, Hélynah était bien trop absorbée par Ian pour faire attention à ce qui les entourait. La frimousse de gamin gourmand qu’il lui servit quand elle parla de pâtisseries lui arracha un sourire tendre et amusé.

-Si par œuvres tu veux parler de gâteaux, tu auras même le droit d’y goûter, lui dit-elle sur un ton taquin, et si tu parles de mes dessins, oui, tu pourras les voir, mais ne t’attend pas à quelque chose de fabuleux, c’est juste un passe-temps.

Ou un problème de modestie, au choix. Quand il la fit tournoyer au rythme de la musique, elle se laissa faire et replongea son regard dans le sien une fois le tour terminé.

-Oh, elle dirait que la famille Holloway est une famille très respectable, que médicomage offre une situation confortable et que c’est un travail prestigieux qui nécessite beaucoup de qualités et que tu es très bien conservé pour ton âge !

Si le début de sa réponse avait été dit sur un ton détaché, ce n’était pas le cas de la fin qui était clairement malicieuse. En réalité, Hélynah savait bien que sa mère désapprouverait sûrement l’âge de Ian et qu’elle lui ferait comprendre, plus ou moins subtilement, qu’elle préférait voir sa fille avec quelqu’un de plus jeune, mais la demoiselle se moquait bien de ce que pourrait penser sa mère. Elle passait un excellent moment avec Ian et elle espérait que la situation continue ainsi, qu’importe ce que pourrait penser ses parents.

En entendant Ian qualifier le personnel de l’hôpital de « bras cassés » et en s’imaginant la moitié des médicomages devenir patients aux urgences, Hélynah ne put que se joindre à l’hilarité de son cavalier. En effet, vu comme ça, mieux valait éviter d’organiser un match de Quidditch avec le personnel de Sainte-Mangouste, sinon le directeur de l’établissement finirait certainement en dépression. Le blond n’avait pas tort en soulignant qu’ils n’étaient déjà pas assez, alors avec une poignée de blessés en plus, l’hôpital se verrait sûrement obligé de refuser des patients ou de les faire attendre de manière considérable. La vision des employés hospitalisés fit se demander à la brune si Ian avait, lui aussi, déjà était patient des urgences. Si en apprenant qu’il y avait déjà été, elle esquissa une petite grimace compatissante, ce fut un sourire qui s’étala sur son visage quand il lui raconta comment s’était passée sa dernière visite.

-Pauvre Glenn, j’espère qu’il n’a pas eu à t’assommer finalement ! répondit-elle sur un ton amusé.

Elle arrivait sans peine à se représenter Ian, patient du service qu’il connaissait si bien, expliquer au pauvre médicomage qui s’occupait de lui comment faire son travail. Elle pouvait comprendre que le pauvre bougre ait eu envie de le faire taire. C’était une expérience qu’elle n’avait pas encore vécue et elle espérait qu’elle n’aurait pas à la vivre. Ou en tout cas, pas de si tôt, parce qu’elle n’était pas sûre de savoir comment gérer un médicomage blessé ou malade.

Quand la jeune femme expliqua au blond pourquoi on le comparait souvent à un viking alors qu’il était allemand, elle ne s’était pas attendue à ce qu’il réagisse de la sorte. Après une légère surprise, elle laissa échapper un petit rire joyeux avant de lui répondre.

-Je ne crois pas avoir jamais rencontré un vrai allemand d’Allemagne un jour, avoua-t-elle sur un ton piteux avec un sourire amusé. Et je ne parlais pas de l’absence d’un ventre à bière, mais plutôt de la présence des muscles qui se cachent sous ta chemise, expliqua-t-elle en caressant légèrement les abdominaux qui se trouvait sur ses doigts.

Elle arrêta ce mouvement quelques secondes avant que Ian ne pose sa main sur la sienne et elle releva la tête vers lui, tombant nez à nez avec un sourire séducteur qui lui fit rater un battement de cœur avant que ce dernier ne s’emballe. Merlin qu’il était canon cet homme ! En toute honnêteté, Hélynah doutait fortement que les hommes présents ce soir soient jaloux parce qu’elle était en sa compagnie. Par contre, elle était prête à parier qu’elle était, à cet instant même, en train de se faire haïr par une bonne partie de la gente féminine parce qu’elle était la cavalière de Ian.

-Tu exagères, murmura-t-elle un tout petit peu gêné. En plus, tu attires beaucoup les regards, constata-t-elle en regardant autour d’eux.

En effet, quelques femmes étaient occupées à les observer, mais l’infirmière s’en moquait royalement. D’ailleurs, elle reporta aussitôt son attention sur son cavalier, elle préférait profiter et savourer chaque instant passé avec lui plutôt que de s’inquiéter de l’effet qu’il produisait. En voyant la grimace qu’eut Ian lorsqu’elle qualifia sa famille de « très respectable », Hélynah ne put s’empêcher de se justifier.

-Par très respectable, je parlais surtout du fait que vous êtes une vieille famille de sang pur qui a su se faire respecter et s’imposer au cours du temps, pas nécessairement du reste…

Et par le reste, elle entendait leur relation avec le ministre O’Connor. Elle avait beau ne pas être positionnée face au gouvernement actuel, c’était surtout dû à un manque d’information mais ce qu’elle savait de la politique du ministre ne lui plaisait pas vraiment. Par contre, quand il fut question de l’âge de Ian, Hélynah lui adressa un sourire tendre mais teinté d’amusement.

-Ne le prend pas mal, déclara-t-elle en prenant sa main dans la sienne, ce serait sûrement la manière polie de ma mère de faire remarquer qu’elle te trouve trop vieux pour moi.

Quand l’orchestre annonça alors l’arrivée de la dernière danse de la soirée, l’infirmière fut surprise, elle n’avait vraiment pas vu le temps passer. Sans compter qu’elle avait réellement apprécier cette journée passée en compagnie de Ian. D’ailleurs, elle était un peu déçue de devoir le quitter à présent, mais elle se consola en se rappelant que, de toute façon, elle le verrait de nouveau très bientôt.